«Je ne sais pas comment arrêter d’être fâché!»
C’est ce que m’a dit mon coco, du haut de ses 4 ans. Un mardi soir bien ordinaire. On a soupé, on a joué et puis une petite étincelle a réveillé le dragon qui dormait dans son bedon.
Mon fils est, tout comme sa maman, un peu soupe au lait. La gestion des émotions n’est pas toujours facile. Lorsque tout fou le camp à l’intérieur de lui-même, le bordel interne devient vite externe. Les cris, les paroles méchantes, le claquage de porte, bref sa manière primitive de gérer sa colère, comme bien des enfants de son âge.
Généralement, je demeure près de lui, de l’autre côté de la porte de sa chambre et lui parle calmement. Lorsqu’il parait diminuer en intensité, je tente une approche. Mais ce soir-là, rien à faire. Probablement à cause d'une méticuleuse combinaison de fatigue, de frustration accumulée et de besoin de se faire rassurer, je n’arrivais pas à capter son attention et à faire mon intervention. Il m’a regardé entre deux crises de tranches de bacon sur son lit et m’a dit «Je ne sais pas comment arrêter d’être fâché».
Quand on passe par la colère des 2 ans et le côté boss des 3 ans, on apprend à gérer nous-mêmes leurs crises. On les apaise du mieux que l’on peut, on leur montre de belles séquences de pictos pour gérer les bons/mauvais comportements, on tente de trouver les mots qu’ils ne sont pas capables de dire. Ce soir-là, j’ai réalisé que mon fils connaissait les mots, il savait l’ordre de ses pictos, il savait que j’étais là pour le rassurer. Il comprenait l’émotion, mais ne savait tout simplement pas quoi en faire. Ça m’a déboussolée.
Comme adulte, il y a des moments où moi aussi je sens le dragon se réveiller dans mon bedon. Par moment, c’est si vif que le jugement prend le bord et que certains mots glissent trop vite sur le bout de mes lèvres. J’ai appris avec le temps à ne pas agir avec cette colère, à prendre le temps de m’apaiser et à me rendre disponible pour pouvoir la nommer et l’expliquer. Mais comment enseigner à un tout petit de 4 ans ce que j’ai mis 30 ans à peaufiner et développer moi-même?
Être parent c’est soutenir nos trésors, mais aussi avoir l’humilité de reconnaitre que l’on n’a pas toujours la solution. C’est accepter que l’erreur ou la méconnaissance sont tout aussi humaines que la réussite et le progrès. J’ai compris à ce moment que je devrai encore une fois, comme maman, me réinventer, m’adapter et chercher des conseils.
Je n’ai pas pu donner une réponse à mon fils ce soir-là. C’est en laissant mon orgueil au pas de sa porte que j’ai pu lui dire que maman ne savait pas. Que parfois, c’est correct de ne pas savoir. Je suis persuadée qu’ensemble et avec quelques coups de pouce extérieurs, on finira par trouver une solution à ce défi et a tous les autres qui viendront.