Les familles recomposées font désormais partie du paysage. Nous connaissons tous des couples qui se forment après avoir fondé une première famille. Après quelque temps, il est très fréquent que les nouveaux amoureux décident d'aménager ensemble... et bien sûr les enfants suivent le mouvement, qu'ils le veuillent ou non.
Dépendamment des arrangements familiaux, on retrouve ainsi un couple et plusieurs enfants qui doivent apprendre à cohabiter sous le même toit à temps plein ou à temps partiel (par exemple, exclusivement pendant les fins de semaine ou les vacances scolaires.)
Évidemment, l'organisation et la dynamique familiale deviennent parfois chaotiques, mais comme nous le verrons, il n'y a pas que des points négatifs. Nous avons posé 4 questions types à 8 enfants âgés de 6 à 14 ans, et issus de 3 familles recomposées différentes. Leurs réponses portent souvent à réflexion...
Question 1 : Que pensez-vous du nouvel amoureux/de la nouvelle amoureuse de votre mère/père ?
Dans tous les cas, et peu importe l'âge des jeunes, les réponses se ressemblent beaucoup. On remarque un effort d'acceptation particulier chez les enfants. Il n'y avait pas de « je le/la déteste », mais il n'y avait pas non plus d'ado en crise parmi ceux que nous avons questionnés...
Il est cependant pertinent de noter que dans les familles interrogées, la dynamique était déjà installée depuis plusieurs années. Il est donc fort possible que les réponses ne soient pas les mêmes dans les premières semaines après le début de la cohabitation, ou si l'on imposait le nouveau conjoint à un jeune qui passe déjà par une crise identitaire...
- « La blonde de mon papa est toujours fine et elle aime bien jouer avec moi au parc. »
- « Moi, je le trouve l'fun quand il est de bonne humeur... Mais dès qu'il commence à me chicaner, je le supporte plus et je veux aller chez mon père! »
- « Je préfère être puni une semaine entière par mon vrai père qu'une heure par Rodrigo. »
- « C'est chouette, on fait des activités différentes... mais je préférais quand même vivre avec mes deux parents. »
Question 2 : Que pensez-vous de leurs enfants?
Encore une fois, la réponse à cette question est venue systématiquement en deux temps. D'abord, presque chaque jeune a dit que c'était « cool, fun » d'avoir toujours du monde avec qui jouer. Ensuite, ils ont généralement ajouté que l'idée de partager leurs affaires et leurs parents avec des « autres » ne les enchantait pas particulièrement.
- « C'est génial d'avoir des amis pour jouer à la maison. Bien mieux que d'écouter les bonshommes parce qu'il y a rien d'autre à faire... »
- « Bof, ça va, mais on pas grand-chose en commun. On s'entend juste parce qu'on a pas le choix. »
- « Moi, j'haïs ça quand ils me demandent de surveiller les petits parce que je suis la plus grande. C'est pas mes vrais frères et soeurs. Ils devraient me payer pour le gardiennage! »
- « J'aime beaucoup Léo, mais c'est dommage qu'on habite ensemble, parce que maintenant c'est comme mon frère alors je pourrais jamais me marier avec lui! »
- « En général, j'aime bien Leïla, sauf quand ma maman lui fait des câlins, alors là, elle m'énerve et je voudrais qu'elle retourne chez sa mère tout de suite. »
- « Tant qu'elle touche pas à mes jeux vidéo, ça va!»
Question 3 : C'est comment de se retrouver tous ensemble dans une seule maison?
Dans tous les cas, sans exception, les jeunes ont dit que, somme toute, ils appréciaient la compagnie des autres enfants. Certains mentionnent qu'il y a évidemment des chicanes à l'occasion, et que l'atmosphère générale est plus « bruyante », mais cela ne leur déplait pas.
Évidemment, dans les faits, les parents n'ont pas manqué de nous faire savoir que les « chicanes » en question sont souvent intenses. Il semblerait pourtant que cela ne soit pas un problème pour les enfants. Comme quoi, les conflits font partie de l'apprentissage de la vie...
- « C'est super quand on est tous à table pour déjeuner le samedi. C'est toujours drôle! »
- « Bon, on se chicane toujours un peu, mais c'est pas grave. Au moins, on joue bien... »
- « Moi, je m'ennuie toujours quand les enfants de Rodrigo ne viennent pas la fin de semaine. J'aime bien mieux être avec eux que toute seule... »
- « C'est le fun quand tout le monde est de bonne humeur. »
- « Ça serait chouette que papa fasse un bébé avec Laurence, comme ça, on serait encore plus nombreux! »
- « Au début, je trouvais que ça faisait trop de bruit, mais maintenant je trouve que c'est trop calme quand on est pas tous ici. »
Question 4 : Qu'est-ce vous aimeriez changer, si c'était possible?
Comme vous vous en êtes rendu compte, les réponses aux questions précédentes semblaient toutes relativement « gentilles. » Par contre, lorsqu'on leur demande ce qu'ils aimeraient changer dans leur routine de vie, ils deviennent réellement loquaces... Voici ce qu'ils ont répondu :
- « J'aimerais que personne ne touche mes affaires, mes jouets. »
- « J'aimerais ne plus avoir à partager ma chambre, même si c'est juste une fois de temps en temps. »
- « J'aimerais qu'on se retrouve parfois ensemble, juste maman/papa et moi (ou nous). »
- « J'aimerais qu'il/elle arrête de changer les lois de la maison. »
- « J'aimerais choisir les films plus souvent. »
- « J'aimerais dormir avec maman. »
Et bien sûr... La réponse préférée des plus jeunes : « J'aimerais que tout redevienne comme avant et que papa/maman revienne ensemble. » Les enfants de 10 ans et plus semblent comprendre plus facilement que la situation est sans retour.
Que pouvons-nous en déduire?
La bonne nouvelle, c'est bien évidemment que les jeunes semblent heureux et réussissent à s'adapter assez bien aux changements, à une nouvelle vie de famille. Ils parviennent à trouver sans trop de difficultés de nouveaux repères et leur évolution générale se retrouve peut-être même enrichie, jusqu'à un certain point, par l'expérience. En effet, ils doivent obligatoirement apprendre à régler des conflits, à respecter les autres, à faire face à l'imprévu.
Par contre, il ne faut pas oublier qu'aussi bien que les choses puissent se passer, la situation n'est cependant jamais « naturelle. » À part dans le cas des enfants qui étaient très jeunes lors de la séparation de leurs parents et ne s'en souviennent pas, il y a toujours une tendance à « comparer » un avant et un après.
Les parents et leurs conjoints devraient donc tenir compte des personnalités respectives des bambins et se rappeler que ce n'est pas parce qu'ils vivent une nouvelle histoire d'amour que tout le reste de la « tribu » partage leurs sentiments.
Des conseils pour les parents
Parfois, les adultes sont tellement satisfaits de leur relation de couple qu'ils en oublient presque que leurs enfants vivent une situation « imposée. » Même si tout semble être au beau fixe, il est nécessaire de prendre en compte tous les signaux qui pourraient être envoyés. La vie moderne n'est pas de tout repos... Mais le temps devrait permettre à tout le monde de se stabiliser dans cette nouvelle situation familiale.
Quelques recommandations supplémentaires
- Faites preuve de patience.
- Sachez écouter vos enfants.
- Ne prenez pas systématiquement parti pour un jeune en particulier (le vôtre, ou celui du conjoint pour qu'il vous « accepte »).
- Appliquez les mêmes règles pour tous. Ce n'est pas parce qu'un jeune n'est là qu'une fin de semaine sur deux qu'il peut échapper aux légumes verts, alors que vous forcez les autres tous les soirs à terminer leur assiette.
- Réservez des moments et des activités avec vos enfants respectifs, et organisez aussi des sorties « en famille ».
- N'essayez pas à tout prix d'obliger les enfants à s'apprécier, mais encouragez absolument le respect : il y a des limites à ne pas franchir, des choses à ne pas dire.
- Le conjoint doit garder sa place, ne jamais chercher à s'imposer ou à remplacer le parent qui n'est plus là.
- Accordez à chaque enfant l'intimité dont il/elle a besoin. Ne les forcez pas à jouer ensemble si l'un souhaite faire autre chose.
Merci à Océane, Charlie, Leïla, Romane, Perle, Driss, Rayan et Léo
Cécile Moreschi, rédactrice Canal Vie