Être en mesure de décider à l’avance du sexe des enfants à naître, c’est un rêve vieux comme le monde. Depuis des siècles, nombreux sont ceux qui ont tenté de trouver une méthode infaillible pour y parvenir. L’alimentation, la position durant les relations sexuelles ou le moment de la conception sont parmi les facteurs qui, croyait-on, avaient une influence sur le sexe des futurs bébés. Le succès des méthodes ancestrales, toutefois, est mitigé. Aujourd’hui, grâce aux progrès de la science, l’utopie pourrait bien devenir réalité... pour le meilleur ou pour le pire.
Techniques de sélection du sexe
Différentes méthodes peuvent permettre de sélectionner le sexe des futurs bébés. Jusqu’à présent, il semble que les trois plus prisées soient :
- l’avortement sélectif
- le diagnostic préimplantatoire
- le tri des spermatozoïdes
Si la première de ces techniques peut être utilisée à la suite d’une conception naturelle, les deux autres méthodes ne fonctionnent que dans un cadre de procréation assistée.
Avortement sélectif
La pratique de l’avortement sélectif consiste, comme son nom l’indique, à provoquer un avortement dans le cas où le sexe du bébé n’est pas celui qu’on souhaitait. Il s’agit de la méthode la plus accessible, surtout dans les pays où l’avortement n’est pas criminalisé.
Quatre méthodes
Quatre méthodes peuvent être utilisées pour diagnostiquer le sexe d’un embryon ou d’un fœtus.
- L’échographie classique
- La prise de sang
- L’amniocentèse
- La biopsie du placenta
Ces trois dernières méthodes, si elles peuvent être appliquées en début de grossesse, sont coûteuses et complexes, ce qui limite leur utilisation dans ce contexte.
L’échographie, qui a lieu vers le quatrième mois de la grossesse, est la technique la plus répandue pour détecter le sexe d’un fœtus. Lorsque celui-ci est révélé, on peut choisir de recourir à un avortement tardif. L’avortement sélectif est une pratique controversée, qu’on tente de limiter dans plusieurs pays.
Diagnostic préimplantatoire et tri des embryons
Dans le cadre d’une fécondation in vitro, on peut prélever des cellules sur les embryons et les analyser, afin d’obtenir différentes données génétiques, dont le sexe des embryons. Par la suite, seuls les embryons correspondant au sexe désiré seront implantés dans l’utérus de la mère. Les embryons non désirés seront détruits.
Tri des spermatozoïdes
Cette méthode, bien qu’elle ne soit pas encore utilisée à grande échelle, est séduisante puisqu’elle ne nécessite ni destruction d’embryon ni interruption de grossesse. Les spermatozoïdes, comportant uniquement un chromosome sexuel, soit X, soit Y, peuvent être identifiés et triés, de façon à ce que seul l’un des deux types de spermatozoïdes soit en mesure de féconder l’ovule (qui est toujours marqué X).
Si l'ovule est fécondé par un spermatozoïde X, l'embryon sera de sexe féminin (XX), s'il est fécondé par un spermatozoïde Y, on obtiendra un garçon (XY). Le tri s'effectue bien sûr dans un contexte de procréation assistée, et il nécessite des appareils très sophistiqués, comme le trieur MicroSort. Cette méthode n'est pas fiable à 100 %, et elle est plus efficace lorsqu'on désire donner naissance à un enfant de sexe féminin.
Une question d'éthique
La possibilité de choisir le sexe des foetus soulève de nombreux débats éthiques. Si les raisons invoquées pour justifier la sélection sont compréhensibles, on peut s'inquiéter des conséquences plausibles qu'aurait une diffusion des technologies à grande échelle.
Pourquoi choisir le sexe de son enfant?
La principale raison qui, à l'heure actuelle, justifie la sélection du sexe des bébés à naître est d'ordre médical. En effet, certaines maladies génétiques graves n'affecteront que les garçons, notamment l'hémophilie et la dystrophie musculaire. Dans le cas où un des parents porte en lui le gène de cette maladie, on peut avoir recours à la sélection du sexe pour s'assurer de la naissance d'une fille qui, bien que potentiellement porteuse du gène, ne développera pas la maladie.
L'autre argument principal invoqué en faveur de la sélection du sexe est l'équilibre familial. Un couple n'ayant donné naissance qu'à des garçons jusqu'à présent peut désirer ardemment avoir une fille, et réciproquement. Les techniques de sélection du sexe pourraient leur permettre de réaliser leur rêve.
La plupart des pays interdisent la sélection du sexe des enfants à des fins non médicales. Toutefois, ailleurs, il n'existe aucun encadrement législatif limitant ce genre de pratique. C'est notamment le cas aux États-Unis.
Les dérives éthiques liées à la sélection du sexe
Si l'utilisation des techniques de sélection du sexe pour raisons médicales est compréhensible, voire louable, il demeure que la généralisation de ces procédés pourrait avoir des conséquences potentiellement graves sur les sociétés.
Dans plusieurs pays du monde, la naissance d'un garçon est beaucoup plus valorisée que celle d'une fille, que ce soit pour des raisons financières ou religieuses. Dans l'éventualité où la sélection du sexe se généraliserait, on pourrait assister à une chute dramatique du nombre de bébés de sexe féminin dans ces pays, ce qui affecterait douloureusement l'équilibre de la société.
Par ailleurs, la sélection du sexe à des fins non médicales risquerait d'ouvrir la porte à d'autres dérives. Éventuellement, peut-être deviendrait-il possible de choisir un nombre important de caractéristiques génétiques et ainsi de créer des enfants sur mesure, améliorés.
La science pourrait donc nous permettre de créer des générations de surhommes. Or, si cette idée peut paraître séduisante sous certains aspects, elle demeure très dangereuse et contre nature. C'est pourquoi plusieurs chercheurs oeuvrant dans le domaine médical choisissent de rester prudents sur cette question et militent en faveur d'un encadrement des pratiques de procréation assistée plutôt que de leur libéralisation.
Alors, le bébé parfait, c'est pour demain? Probablement pas...
Jeanne Dompierre, rédactrice Canal Vie