Depuis quelques années, on entend régulièrement parler de l’agrile du frêne, un insecte qui pourrait être bien joli (pour ceux qui aiment les insectes) s’il ne détruisait pas systématiquement les nombreux frênes présents dans les forêts et les régions urbaines du Québec, mais aussi de nombreuses autres régions d’Amérique du Nord. Mais comment reconnaître cette petite bête, et surtout, quelle est l’importance de la menace qu’elle représente? Peut-on l’éradiquer?
Qu'est-ce que l’agrile du frêne?
Il s’agit d’un insecte qui appartient à la famille des coléoptères. Adulte, il mesure environ ½ pouce (12 mm) de longueur pour 1/8 de pouce (3 mm) de largeur. Il est vert métallique : iridescent sur le dos et vert vif sur l’abdomen. La larve de l’agrile, quant à elle, peut atteindre plus de 1 pouce (3 cm) de longueur et prend la forme d’un gros vers blanchâtre et segmenté.
Cet insecte est originaire de l'Asie. Il semblerait qu’il ait été identifié pour la 1re fois au Canada, plus préciséement à Windsor en Ontario, en 2002. Il y aurait été introduit avec l’entrée sur le continent de caisses et d’autres matériaux de bois contaminé. Depuis, il a été détecté en Montérégie (2008), à Montréal et Gatineau (2011), à Longueuil (2012), à Terrebonne (2013) et à Québec (2017).
L’agrile vit en moyenne 1 à 2 ans et pond ses œufs sous l’écorce des arbres. Les larves, en se nourrissant, creusent des galeries sous l’écorce et perturbent ainsi le transport de l’eau et des éléments nutritifs indispensables à l’arbre. Quelques insectes suffisent pour tuer un frêne en 2-3 ans, parfois moins. Ce qui est problématique, c'est qu'en Amérique du nord, cet insecte a peu d'ennemis naturels qui pourraient empêcher ou du moins ralentir sa propagation.
Quel danger?
L’agrile du frêne s’attaque à toutes les espèces de frênes présentes dans les forêts et régions urbaines. Il se propage le plus souvent en se faisant « aider » par les humains, c'est-à-dire lorsque ces derniers déplacent branches, planches, bois de chauffage, sciure et autres matériaux possiblement infestés. Il est d'ailleurs recommandé de ne pas transporter de bois de chauffage d'une région à l'autre du Québec afin de restreindre la propagation des insectes. par exemple, si vous habitez en Montérégie ou de nombreuses infestations sont en cours et que vous possédez un chalet en Beauce, vous ne devriez pas apporter vos restes de bois au chalet, mais plutôt en acheter sur place directement.
Les frênes sont des arbres très courants, tant dans les villes dont ils bordent les rues que dans les boisés et forêts naturelles. On estime que plusieurs millions d’arbres sont déjà morts et que la propagation de l’insecte pourrait entrainer la perte de milliards d’autres, ce qui modifierait sévèrement les paysages. Il s'agit de l'insecte les plus ravageur de tous les temps sur le territoire québécois.
Comment reconnaître sa présence?
Comme les larves sont situées sous l’écorce, on ne les remarque pas toujours, mais plusieurs signes devraient vous mettre la puce à l’oreille :
- Le haut de l’arbre perd des feuilles et des branches.
- La cime est dégarnie.
- Des gourmands (nouvelles branches) poussent sur la partie inférieure du tronc.
- Des fentes et des rainures en forme de « S » sont présentes sous l’écorce.
- De petits trous en forme de « D » apparaissent aussi dans l’écorce : ce sont les voies utilisées par les insectes adultes pour sortir.
Peut-on se débarrasser des agriles du frêne?
Les frênes qui sont infestés depuis plus d’un an ne survivront pas et l’abattage est souvent la seule issue possible. Si l’on remarque qu’un frêne est infesté, cela veut dire que les insectes l’on déjà colonisé depuis au moins un an.
Il existe toutefois un traitement insecticide préventif pour sauver l’arbre lorsque l’infestation est précoce ou avant qu’elle ne survienne. Les tarifs pour ce traitement commencent à environ 200 $ pour un arbre de petit calibre (1 pied de diamètre) et augmentent proportionnellement à la taille, pouvant parfois aller jusqu’à 1000 $ pour les arbres matures et très gros. Ce traitement doit être répété tous les 2 ans pendant une quinzaine d’années pour s’assurer que les insectes ne reviennent pas. Le traitement doit absolument être fait par des personnes qualifiées. Pour savoir combien vous devriez débourser, on vous encourage à consulter une entreprises qui s’occupe d’administrer ce « vaccin » aux arbres : elles offrent habituellement un estimé des coûts.
De plus, c’est toujours une bonne idée de vous renseigner avec votre municipalité avant de payer le prix fort, car plusieurs d’entre elles ont des arrangements avec certaines entreprises, pour permettre au grand public de réduire les tarifs.
Les spécialistes s’entendent pour dire que, vu la prolifération actuelle des agriles, un frêne qui n’est pas encore contaminé le sera tôt ou tard et qu’il faut absolument mettre en place le traitement préventif… ou en faire du bois de chauffage!
Quelles mesures contre ces insectes?
Étant donnée la vitesse à laquelle les agriles se propagent et tuent les frênes, il semble impossible de les éradiquer à court terme. Toutefois, plusieurs mesures ont été mises en place afin de limiter au maximum leur propagation :
- Réglementation pour les déplacements de bois de chauffage et autres produits constitués de bois de frêne.
- Mise en œuvre des mécanismes pour faire appliquer la loi.
- Surveillance et inspections régulières des arbres.
- Communication efficace pour que le grand public soit sensibilisé au problème.
- Soutien financier pour les chercheurs qui tâchent de trouver une solution au problème.
- Tarifs préférentiels pour les particuliers qui choisissent de faire traiter les frênes situés sur leur terrain (dans certaines municipalités).
Cécile Moreschi, rédactrice Canal Vie