Il faut croire que le mois de janvier inspire beaucoup les idéateurs de tendances... Je vous parlais la semaine dernière de la mode du Dry January, ce mouvement populaire qui encourage les gens à s'abstenir de prendre de l’alcool pour commencer l’année du bon pied. Dans les jours qui suivaient, en plus du Veganuary, qui vous suggère de prendre une pause de produits animaliers, on apprenait qu’on était également en plein Januhairy. Ah ben, coudonc!
Le quoi? Le janvier poilu!
Le Januhairy est un défi qui invite les femmes à ne pas s’épiler pendant un mois, dans le but d'amasser des fonds pour un organisme qui fait la promotion du bien-être corporel.
C'est un peu le nouveau Movember des femmes, mais plus controversé, parce qu'une moustache ironique sur le visage d'un homme cause moins de remous qu'une femme aux aisselles poilues.
C’est une étudiante britannique qui a lancé l’idée du Januhairy, afin d’encourager les femmes à aimer leur corps. Elle a invité ces dernières à partager des photos qui illustrent la progression de leur pousse de poils.
Il n’en fallait pas plus pour que l’internet pogne en feu, et que des milliers d’hommes et de femmes viennent se vider le cœur pour dire à quel point ils sont dégoûtés par cette poignée d'images de jambes et d'aisselles velues.
On pourrait traduire le concept par « janvier poilu ». Ce n’est pas bête comme nom. Surtout qu’ironiquement on n’est jamais autant exposés aux poils qu’en hiver.
Je m'explique! Quiconque utilise le métro pour se déplacer à Montréal en plein hiver a le bonheur chaque matin de se faire chatouiller les narines par le capuchon en fourrure des manteaux d'inconnus... Sans oublier que l’un des grands secrets de polichinelle de notre époque est que plusieurs femmes cachent des pattes d’ours sous leurs pantalons ces jours-ci, une fois la saison de l’hibernation venue.
La saison du poil est donc officiellement commencée depuis quelque temps.
Montrez ces poils qu'on ne saurait voir
Personnellement, je n’ai pas l’intention de participer au défi, du moins pas au-delà de ma paresse ordinaire!
Je trouve tout de même fascinante la réaction de dégoût intense que ce mouvement provoque chez certains. En soi, les détracteurs qui s’offusquent avec tant de force ne font que valider encore plus le mouvement, qui a pour but de nous rappeler que le poil, ce n’est que ça: du poil. Ni plus ni moins.
Sans vouloir que tout le monde cesse immédiatement de s’épiler, je trouve positive l’idée qu'un jour, si j'ai à me montrer les jambes et qu'elles ne sont pas fraîchement rasées, je ne serai pas une créature de cirque, ou que je ne me ferai pas arrêter par l'escouade policière de l’épilation.
Et pourtant, je ne suis pas particulièrement fan du poil non plus : j'ai moi aussi été conditionnée à trouver ça gênant.
Vous savez, j'ai vu un tas de belles choses dans ma vie, et les touffes de poils n’en font pas partie. Disons que je ne pense pas refaire prochainement la déco chez moi en accrochant des photos encadrées d’aisselles velues dans mon salon. (Il ne faut jamais dire jamais, je sais.)
Par contre, si je remarque qu'une femme a du poil visible sur son corps, ça ne me dérange aucunement. Même que je la trouve audacieuse, surtout si c'est une belle femme et qu'elle s'assume. Bien sûr, je n'ai pas particulièrement envie d'aller regarder de plus près ou de me frotter le visage sur sa pilosité. Je ne la considère simplement pas comme étant radioactive. De toute façon, je ne serais pas plus intéressée par son mollet s'il était rasé, pour être honnête. Elle fait ce qu'elle veut. Son corps, c'est à elle.
C'est là que cette tendance menée par des femmes qui se réapproprient leurs poils fait une différence intéressante! En normalisant la vue de poils à laquelle on est de moins en moins habitués, on va finir par arrêter d'en faire un débat mondial qui soulève plus les passions que la pollution des océans ou les crises humanitaires qui nous entourent, quand on ose regarder un peu plus loin que le bout de notre rasoir jetable. (Qui finira peut-être un jour sur un continent de plastique quelconque?)
Parce que si on continue de foutre le bordel sur la planète, croyez-moi que les jambes pleines de fourrure seront le dernier de nos soucis. N'avoir plus de poils ne nous fait pas évoluer plus rapidement comme espèce. (Avoir les jambes poilues non plus, je suppose.)
Le lobby du « pas d'poils »
Les évangélistes anti poils ne badinent pas avec le rasoir! Oui, quelqu'un a le droit d’être dégouté. Mais n'est-ce pas là un signe d'immaturité? Une peur de la puberté? Une grande superficialité?
Je le répète: les gens qui ressentent un malaise à la vue d’un mollet poilu ont tout à fait le droit d’être dégoutés et de commenter à ce sujet dans l’espace public. C'est même prévisible. C'est aussi pour eux l'occasion parfaite de faire une introspection sur l'origine de cette honte du corps tel qu'il est. L'acceptation de soi, c'est la base, non?
Il faut dire que Barbie n'a jamais eu les jambes en cactus ni aucune autre partie de son corps.
À une époque où des influenceuses suggèrent aux femmes de se raser le duvet du visage pour paraître plus jeune, on finit par se demander si le lobby de l'épilation existe.
Plus que jamais, les femmes (et certains hommes!) sont sans poil, et l'on continue de trouver de nouvelles zones à débroussailler. Pourtant, je trouve ça sexy des jambes d'hommes poilues! L'idée qu'un athlète masculin s'épile le corps en entier pour gagner en aérodynamisme m'attriste presque.
C'est deux poids, deux mesures, le poil, non?
Poils, pas poils, j'y vais!
Il va falloir s'y faire : la pilosité est un choix comme un autre. Peut-être que le lobby de poils contre-attaquera avec force au fil des prochaines années, au point où en 2050 la mode sera aux greffes de poils sur le corps.
Chewbacca sera-t-il un jour notre modèle de beauté? On pourra reprendre cette réflexion d'un angle nouveau quand on sera rendu là...
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